Espèces exotiques envahissantes : la drosophile à ailes tachetées

novembre 1, 2017

Par J. Allen et L. Farmer

Pour le Canadien moyen, les mots « espèces exotiques envahissantes » pourraient transmettre des images dignes de films de catégorie B mettant en vedette des OVNIS et des bonshommes verts borgnes. Pour les producteurs horticoles canadiens, ces trois mots signalent une réalité de mauvais augure. C’est particulièrement vrai pour les producteurs canadiens de fruits d’été pulpeux (p. ex., cerise, bleuet, framboise, mûre, fraise, pêche, nectarine, abricot et raisins) à cause de l’introduction et de la propagation d’une de ces espèces exotiques envahissantes : le Drosophila suzukii, la drosophile à ailes tachetées (DAT).

En 2012, à la suite de l’Atelier sur l’établissement des priorités canadiennes en matière de pesticides à usage limité (PUL) dirigé par Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC), et au cours duquel la DAT a été identifiée comme espèce envahissante prioritaire, il a été évident qu’un accent différent serait nécessaire, étant donné que si peu était connu sur la biologie de l’espèce envahissante et la façon de la contrôler. Sous le leadership du Conseil canadien de l’horticulture et du Centre de la lutte antiparasitaire d’AAC, avec la participation d’experts provinciaux qui étaient sur la première ligne pour faire face à l’espèce envahissante, un Groupe de coordination des espèces exotiques envahissantes a été créé. Le mandat du Groupe de coordination est de faciliter le partage de l’information et de coordonner les efforts de recherche pour comprendre l’espèce envahissante et pour trouver des solutions de gestion pour deux espèces envahissantes, dont l’une était la DAT.

Pour commencer, le Groupe de coordination a créé le Groupe de travail technique sur la DAT, qui est composé d’experts provinciaux, de chercheurs du secteur public et de représentants de l’industrie. Le Groupe de travail technique sur la DAT est coprésidé par Tracy Hueppelsheuser (ministre de l’Agriculture de la Colombie-Britannique) et Leslie Farmer (Centre de la lutte antiparasitaire). Depuis 2012, elles ont coordonné l’échange d’information sur la recherche sur le DAT et les activités de sensibilisation qui se déroulent à travers le Canada.

À la fin 2016 et au début 2017, le Groupe de travail technique sur la DAT a organisé quatre webinaires qui étaient ouverts à tous. Le but de la série était de partager les activités de recherche et d’enrichissement ainsi que de fournir une tribune de discussion pour identifier les besoins et écarts à venir tant du point de vue de la recherche que des travaux sur le terrain.

Les présentations et les témoignages de partout au pays ont permis aux participants d’apprendre et de discuter des questions importantes, telles que les activités de surveillance et de dépistage; les avantages et les désavantages de différents types de piège; le rôle des attributs du paysage dans les réservoirs de population et les localités d’hivernation; les options conventionnelles et biologiques de gestion des parasites; les recommandations après la moisson; l’usage des barrières physiques; les résultats des premières recherches sur la technique de stérilisation des insectes; la recherche physiologique (c.-à-d., la tolérance au froid); et la façon dont les agents de contrôle biologiques peuvent faire partie de la boîte d’outils de gestion.

Certains faits importants échangés pendant ces sessions ont inclus :

  • La DAT peut hiverner dans certains secteurs du Canada et survivre dans de nombreux hôtes sauvages, y compris les plantes des genres suivants : les espèces Ribes, Sambucus, Berberis, Prunus, Lonicera et Symphoricarpos.
  • Bien que les choix soient nombreux pour les systèmes de piège et d’appât, les fruits mûrissants réussissent quand même à attirer le parasite.
  • Les fruits mûrissants pendant le milieu à la fin de la saison comportent le plus grand risque d’être touchés.
  • La recherche sur la gestion des parasites est en cours et la gestion durable efficace exigera des outils multiples; il ne s’agit pas d’un parasite qui sera contrôlé par une seule « solution miracle ».
Une drosophile aux ailes tachetées sort de l’intérieur d’une prune abîmée. Photo : Ministre de l’Agriculture de la Colombie-Britannique

Le niveau élevé de participation à la série des webinaires démontre clairement jusqu’à quel point les producteurs horticoles canadiens sont au courant et désireux de se garder à jour sur la recherche actuelle et les activités qui ont une incidence sur leurs opérations.

Plusieurs de ces mêmes producteurs participent à l’Atelier annuel sur l’établissement des priorités relatives aux pesticides à usage limité. Le Programme des pesticides à usage limité (PPUL) du Centre de la lutte antiparasitaire rassemble des producteurs, les provinces, les fabricants de pesticides et le programme américain des cultures spécialisées IR-4 pour établir les besoins en matière de cultures et d’organismes nuisibles cernés par les producteurs et les jumeler à des solutions possibles, en particulier des produits à risque réduit sur une base annuelle. À titre d’intervenants de première ligne de la lutte antiparasitaire, les producteurs connaissent d’expérience les impacts des problèmes associés aux ravageurs persistants et émergents sur leurs opérations; leur participation est donc cruciale pour établir les priorités de recherche du PPUL. Depuis 2011, le PPUL s’est penché sur 23 priorités relatives aux pesticides à usage limité pour le contrôle des DAT. Une partie de ce travail est terminée et les données sont déjà soumises à l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada aux fins d’examen. Les enregistrements des pesticides à usage limité découlant de ce travail fourniront aux producteurs des outils utiles pour aider le contrôle de ce parasite envahissant complexe.

Une drosophile aux ailes tachetées sort de l’intérieur d’une pêche abîmée. Photo : Ministre de l’Agriculture de la Colombie-Britannique.

Le Programme de reduction des risques liés aux pesticides du Centre de la lutte antiparasitaire travaille en collaboration avec des groupes de producteurs, l’industrie, les provinces et les chercheurs pour identifier les lacunes inhérentes à la gestion des parasites et les possibilités de réduire le risque des pesticides pour aborder ces lacunes. Récemment, le Programme a lancé une nouvelle stratégie pour s’occuper des parasites nuisibles des fruits mous et la DAT a été identifié comme l’un de ces parasites prioritaires. Grâce aux connaissances découlant de la recherche actuelle et la gestion des lacunes acquise de la série de webinaires, ce groupe de travail sur la stratégie détermine maintenant les priorités d’action liée à la DAT en vertu de cette stratégie de risque réduit. Le but global de la stratégie est de réduire les risques liés à l’usage des pesticides dans la gestion de ces parasites et de faciliter la transition vers une gestion durable et efficace à plus long terme. Pour de plus amples renseignements au sujet de cette initiative, veuillez communiquer avec .